Oncle Akra sillonne et mise en pièces

Oncle Akra se penche aujourd’hui sur la question que tout le monde se pose, et ce depuis quelques chapitres de cette saga haletante :

Si un individu est indivisible et indissociable, est-ce qu’un multividu sont multivisibles et multisociables ?

Eh bien, précisons d’emblée qu’il ne s’agit pas à proprement parler de multividus dans les cas d’ubiquité : les différents sujets d’un multividu sont des créatures distinctes qui peuvent éventuellement s’interpénétrer lors de certaines pratiques masturbatoires mais ne sont en aucun cas des émanations l’une de l’autre. (Ou l’autre de l’une, c’est une autre question, mais qui concerne précisément les ubiquites, et là, aujourd’hui, on se préoccupe des multividus, ça donne déjà suffisamment d’occasions de se disperser pour ne pas aller encore inclure des situations connexes.) Ne nous éparpillons pas, ça ne produit jamais rien de bon vous savez, Philopin, faites donc preuve d’un peu de méthode.

Chacun conçoit aisément que l’existence de plusieurs corps distincts rend la potentialité de multivision évidente et manifeste. Pour qu’elle devienne une réalité tangible, il ne reste qu’à rassembler quelques conditions circonstancielles : que l’observateur concerné dispose du sens de la vue, et s’en serve présentement, que dans son champ de vision se définisse un espace dégagé d’obstacles opaques où se trouvent plusieurs membres d’un multividu donnés dans des conditions d’éclairement suffisantes, que nul ne joue à cache-cache ou n’ai consommé une potion d’invisibilité et enfin que l’observateur soit de bonne foi.
Certains prétendent que même un individu observé à l’aide d’une vision binoculaire (voire plus) entraine par principe fondamental l’existence d’images multiples et se trouve donc être indivisible (sauf violence) ET multivisible dans ces conditions, mais c’est là faire preuve de mauvais esprit.

Les conditions suffisantes et nécessaires à ce qu’un multividu soient multisociables sont, je vous le concède, plus délicates à énoncer simplement de manière exhaustive. Car même un multividu peuvent être, et ce de tous ses membres, asociaux au dernier degré. Il arrive même qu’un multividu développent des troubles psychopathologiques de la cohésion, comme certains individus psychotiques peuvent avoir des angoisses de morcellement.

Dans certains cas de fatigue intense ou de débilité avancée, il arrive également qu’un multividu ne parviennent à parler (ou globalement ne puissent établir une communication avec autrui par émission de messages sensés et volontaires) qu’à l’aide d’un seul de ses membres en même temps. Pas facile dans ces conditions d’espérer le trouver sociables en fréquentant l’une des parties atones et taciturnes.

De plus, vous devez le savoir si vous n’avez pas de tout temps vécu en ermite, la sociabilité peut être affaire d’espèces, d’instants, de circonstances, de personnalités … et je ne saurais donc m’engager à ce que n’importe lequel d’entre vous soit à même de trouver multisociables un quelconque et tout aussi inconnus de moi multividu de votre entourage. Contrairement à ce qu’aurait pu vous laisser croire le titre en calembour du jour, je ne suis pas prêt à sillonner la galaxie pour engager de faibles sommes sur des paris hasardeux !

Il est à noter sans entrer dans de trop scabreux détails psycho-sociaux qu’il peut advenir pour un multividu donnés de ne se trouver sociables auprès d’une entité extérieure à ses membres qu’avec un seul de ceux-ci. Autant dire qu’en cas d’identité physique parfaite des membres entre eux, il devient même délicat pour quiconque de le considérer comme sociables tout court.

© Frankygnol, dessins de Davido